Regard Lunaire n’avait jamais ressenti un tel sentiment. Il était déçu, triste, inquiet. Déçu de ce qu’il avait pu voir, triste de savoir que son amie pouvait agir ainsi, et inquiet pour elle. Mais il était surtout en colère. Une colère qu’il ne pouvait pas expliquer. Il était hors de lui. Il n’avait jamais rien ressenti d’aussi fort de sa vie. Qu’elle était la cause de tout ça ? Pour cela il fallait remonter à la veille.

Le guerrier tigré était comme à son habitude sorti chasser. Le camp manquait de proies de jour en jour. Il s’en désolait et redoublait d’effort pour aider tout le clan à surmonter cette épreuve. Sa quête l’avait amené près des frontières du clan. Il avait scruté l’autre côté de la limité invisible, se léchant les babines en pensant à ce qu’il pourrait trouver de l’autre côté. Mais c’était interdit. Il le savait bien. Traverser les frontières c’était enfreindre le code du guerrier. Et jamais au grand jamais, il n’oserait le faire.

Il avait alors déjà attrapé deux mulots pas assez prudents en cette saison, lorsqu’il entendit des bruits. Instinctivement, il s’accroupit au plus près du sol. Il reconnaissait le bruit de voix au loin. Deux voix différentes. Une qu’il ne connaissait pas contrairement à la deuxième qui lui était étrangement familière. Lentement, il s’approcha, tentant de ne pas éveiller de soupçons, de ne pas se faire prendre. Il s’agissait peut-être d’une patrouille adverse. Il n’en était pas sûr, mais on n’était jamais trop prudent.

Il s’approcha lentement, doucement, les oreilles dressées. La hauteur de la neige lui permettait de cacher la moitié de son corps. Lorsqu’il arriva au plus près des voix, il ne put réprimer son étonnement. Il reconnut le pelage de Nuage des Lucioles son amie. Mais celle-ci n’était pas seule. En face d’elle, de l’autre côté de la frontière se trouvait un autre chat. Un mâle. De quel clan, il ne saurait le dire. Le vent n’était pas assez fort pour lui apporter les odeurs à cette distance. Mais ce dont il était sûr, c’était que ce chat ne faisait aucunement parti de son clan. Le clan de la Rivière. Et Nuage des Lucioles semblait discuter avec lui comme s’ils avaient été amis depuis des lunes.

Il ressentit une sorte de pincement au cœur. De la déception ? Oui. De la tristesse ? Oui. De la colère ? Oui, il ressentait la colère. Il la sentait bien. Au plus profond de son cœur. Mais il y avait un autre sentiment qu’il n’arrivait pas à définir. Un sentiment étrange. Un sentiment qui lui serrait le cœur et lui donnait envie de pleurer. Lentement comme il était venu, il reparti, silencieusement, telle une ombre. La queue basse, le cœur en mal, il rentra au camp avec ses proies, les déposa sur le tas de gibier et alla directement s’allonger dans la tanière des guerriers. Que faisait Nuage des Lucioles avec un ennemi ? Etait-elle passée du côté adverse ? Avait-elle décidé de changer de clan sans même lui en parler ? Il se sentait triste, tellement triste. Il ne savait que faire. Il voulait s’enfoncer dans un trou de souris et ne plus ressortir. Il se sentait tellement mal. Mal d’avoir vu tout ça. Mal de ne pas savoir se l’expliquer, mal de ne pas avoir demandé des explications à son amie.

Il ne put dormir de toute la nuit. Il pensa sans cesse à la scène. Etait-elle réellement qui elle était ? En ces temps difficiles, avait-elle décidé d’aider un autre clan qui lui aurait promis autre chose en échange ? Etait-elle tombée amoureuse d’un chat d’un autre clan ? Cette idée lui faisait mal, tellement de mal. Il la chassa immédiatement, tentant d’aider son cœur à se remettre de ces émotions. C’était certain, le lendemain, il irait lui parler…

Le soleil était encore bas dans le ciel, mais le matou était éveillé depuis des lustres. Il n’avait pas réussi à dormir. Il attendait le jour. Il attendait le moment. Les muscles ankylosés, il sortit de la tanière déterminé. Il vit Nuage des Lucioles au milieu de la place centrale. Il ne savait pas exactement ce qu’elle faisait, ni si elle semblait occupée ou pas. Sa vision était brouillée, comme s’il devenait aveugle. Il s’approcha de la femelle, la queue basse, tentant à la fois de détendre ses muscles. Dès qu’il faisait un pas, il sentait le poids de sa colère dans son cœur. Il n’allait pas pouvoir la tenir longtemps. Sa colère était plus forte que sa volonté. Sa loyauté, sa fidélité lui coûtait beaucoup.

« Nuage des Lucioles. J’ai besoin de te parler. »

Ses mots furent secs, lents et plus forts qu’il ne le voulait. Il espérait que l’apprentie ne prenne pas ça mal, mais il ne pouvait pas le supporter. Il fallait qu’il règle ça avec elle. Il ne voulait pas la dénoncer aux autres chats du clan avant de lui en parler à elle.

Nuage des Lucioles s’assit en face du guerrier. Ses gestes témoignaient sa volonté de ne pas être là, mais elle semblait s’obliger à le faire. Sèchement, elle répondit au mâle, faisant écho au ton qu’il avait pris juste avant. Il savait qu’il ne devrait pas lui parler comme cela. Qu’il risquait de lui faire du mal et de se faire du mal à lui aussi. Mais une partie de lui ne pouvait pas se retenir. La queue fouettant l’air, il se leva et lui fit un signe de la tête en lui demandant de la suivre dans un coin du camp. De nombreux chats allaient et venaient autour d’eux, et Regard Lunaire ne voulait pas risquer un scandale en public. Il s’avança dans un coin plutôt sombre et reculé. Là au moins, il était sûr qu’on ne viendrait pas les embêter. Il était nerveux. Sa colère grandissait. Ce sentiment bizarre aussi. Il balaya le sol de la queue de plus en plus nerveusement.

« Bon, je ne vais pas passer par quatre chemin ! Je t’ai vue hier. Je t’aie vu à la frontière du Tonnerre. Je t’ai vue parler à un chat, inconnu. Un chat d’un autre clan ! Non mais tu faisais quoi ??! Tu sais très bien qu’avec les temps qui courent, il faut se méfier ! Et toi ! Tu discutes ! TU DISCUTES AVEC L’ENNEMI ! Mais vraiment, tu es folle ou quoi ?? Imagine qu’Etoile de Larmes ou Chauve-Souris t’auraient vu ? Imagine s’ils étaient tombés sur toi comme ça !! Tu es inconsciente ou quoi ? Que ce soit un ami ou un ennemi, on ne parle pas comme ça à la frontière !! Mais sérieusement Nuage des Lucioles !! Et ton clan alors ?! Le clan passe avant tout, tu l’as oublié ? J’espère pour toi que tu ne lui a rien dit sur l’état du clan ! Qui sait s’il n’était pas là exprès pour recueillir des informations !! Les espions sont très malins, tu es bien placée pour le savoir non ? Et s’ils nous attaquent maintenant ? Tu penses aux autres chats du clan ? Tu penses à tout ça ?? Réfléchi Nuage des Lucioles !!!! On ne fait pas ça !!! »

La détresse, la colère, la….jalousie ? Tout se lisait dans les yeux du matou tigré. Il ne retenait plus ses sentiments. Il laissait tout sortir, quitte à la blesser. Il sentait que ces mots étaient durs, secs, à la limite de la méchanceté. Mais elle devait ouvrir les yeux. Il avait peur. Pas pour lui, ni pour son clan. Il avait une peur incontrôlable pour elle. Que serait-il advenu d’elle si le chat n’était pas seul ? Que serait-il advenu si un autre chat de la Rivière l’avait vu ? Que serait-il advenu s’il ne disait rien…

Hors RP:

Spoiler:

La réaction de Nuage des Lucioles fit du mal au guerrier. Les yeux emplis de haine, le dos rond, les poils hérissés, elle s’était éloignée de lui. Il sentait maintenant le vrai poids de ses paroles. Il était parti loin, trop loin. Il ne s’était pas contrôlé. Il ne savait pas quoi faire. Impuissant, il regarda les larmes dans les yeux de son amie. « Crotte de souris », se dit-il.

« Tu me croie aussi idiote que ça Regard Lunaire ? Me croies-tu assez idiote pour révéler des informations à l'ennemie ?! Si tu veux tout savoir j'avais franchi la frontière sans le faire exprès et cet apprenti me l'a fait comprendre ! Mais il ne m’a pas attaqué alors qu'il aurait pu le faire ! Il m'a raccompagnée à la frontière c'est tout ! Nous n'avons pas discuté, je l'ai simplement remerciée ! Pour quoi est-ce que tu me prends Regard Lunaire ? Pour un chaton qui viens de sortir de la pouponnière ?! Je sais très bien qu'il faut se méfier des autres clans, pas besoin de me le rappelé ! »

Cette douleur au fond de son cœur. Qu’avait-il dit. Qu’avait-il fait. Il était vraiment parti trop loin. Il perdait une amie, une sœur. Pourquoi était-il aussi bête ? Que deviendrait-il si celle-ci ne lui adressait plus jamais la parole. Il l’aimait tellement, elle était sa meilleure amie. Il ne pouvait pas détruire cette amitié comme cela. Il se sentait aussi intelligent qu’une souris sans cervelle. Le souffle coupé, Nuage des Lucioles continuait d’extérioriser sa rage, sa colère envers le mâle.

« Je te pensais différent des autres, j'avais l'impression qu'on pouvait aller au bout du monde, que notre amitié était à l'épreuve de tout, je me trompais. Mais dit moi, dit moi Regard Lunaire, tu aurais très bien pu intervenir et tu ne l’a pas fait ! Pourquoi ? Par lâcheté ?! »

Lui aussi se croyait différent. Il croyait être différent des autres chats, être un guerrier respectable. Il se sentait comme un moins que rien. Mais de là à être catégorisé de lâche. Jamais, jamais il ne le supporterait. « Moi, lâche ? MOI, LÂCHE ?? ». Lorsqu’il se fit bousculer par l’apprentie, il ne put réprimer un grognement. Il la vit s’enfuir en dehors du camp. Certains chats le regardaient de travers. « Non mais de quoi ils se mêlent ? ». Il suivit Nuage des Lucioles, bien décidé à lui montrer s’il était vraiment un lâche. Elle était peut-être son amie, mais il ne laisserait personne le traiter ainsi ! Il avait toujours été un guerrier droit, respectueux, et….

« A l'aide ! »

Il reconnut la voix de Nuage des Lucioles, cette voix qu’il reconnaitrait entre des millions. Affolé, il se mit à courir le plus rapidement possible. Jamais il n’avait couru aussi vite de toute sa vie de chat.

La glace cassée, aucune trace de l’apprentie. « Non. Ne me dites pas que… » Les yeux écarquillés par la peur, le matou n’hésita pas plus d’une demie seconde avant de se jeter dans l’eau. L’eau était trouble, il ne voyait pas grand-chose, mais il fallait qu’il retrouve Nuage des Lucioles. Si jamais il l’a perdait pour de bon…. Qu’allait-il devenir ? Sa vie sans elle ne serait rien. Et ça il s’en rendait bien compte. Elle faisait partie de sa vie. Elle était une partie de sa vie. Elle était sa vie.

Le matou se jeta sur la tâche brune-rousse qui dévalait le courant. Le pelage entourant le coup de l’apprentie entre les deux, il lutta de toutes ses forces contre le courant glacé. Ses muscles étaient transis de froid, il commençait à ne plus sentir le bout de ses pattes. Il avait extrêmement froid. Mais il devait sortir et pas l’occasion sortir Nuage des Lucioles de là. La glace crissait sous ses griffes en tentant de s’y agripper. Non ils ne pouvaient pas finir ainsi tous les deux. Dans un élan de vivacité, il réussit à trouver une prise sur la berge. Il s’extirpa avec difficulté, tirant Nuage des Lucioles sur la terre ferme à l’abri.

Il scruta son visage le souffle court. Elle était inconsciente. Affolé, il ne savait que faire. Il chercha de l’aide autour de lui, mais personne ne semblait les avoir entendus. Les larmes roulant dans son pelage trempé, le mâle ne pouvait surmonter la douleur au fond de sa poitrine. Ce sentiment. Il se souvenait enfin. Il se souvient de ce que c’était.

« Nuage des Lucioles !!! Je t’en prie, réveille-toi ! Ne me laisse pas ! Je suis désolé ! Désolé de tout ce que j’ai dit, de tout ce que j’ai fait !!! Je ne voulais pas que ça en arrive là !! J’étais inquiet, trop inquiet ! La simple idée qu’il puisse t’arriver la moindre égratignure me fait faire des cauchemars ! J’ai tellement peur qu’il t’arrive quoique ce soit. Je suis allé trop loin, je le sais. Mais te voir avec un autre dans une zone potentiellement dangereuse m’a mis hors de moi. J’étais à la fois inquiet et jaloux. Jaloux de te voir parler avec un autre mâle que moi. Jaloux de voir ce sourire que j’aime tant sur ton museau destiné à un autre que moi. Je ne pouvais pas le supporter. Je suis désolé, tellement désolé Nuage des Lucioles. Ouvre les yeux, je t’en prie ! »

Le guerrier se sentait dévasté. Il ne pouvait s’arrêter de pleurer. Il cherchait le moindre signe qui puisse l’indiquer que la femelle allait bien. Il tremblait de froid. Il essaya tout de même de réchauffer l’apprentie en lui léchant vigoureusement le museau. Elle ne pouvait pas partir maintenant. Il avait besoin d’elle. Il avait besoin de sa présence dans sa vie. Il l’aimait. Oui, c’était ça. L’amour. Nuage des Lucioles n’était pas simplement une amie, une confidente, une sœur. Non. Elle était bien plus. Elle était celle que Regard Lunaire avait décidé d’aimer. Il voulait passer toute sa vie auprès d’elle. Ne plus la laisser partir.

« Nuage des Lucioles, je t’en prie !!! »

Lorsque Nuage des Lucioles ouvrit enfin les yeux, le matou sentit le poids sur son cœur s’envoler. Il désespérait de la voir revenir à elle. L’apprentie crachota l’eau qui emplissait ses poumons, tentant par la même occasion de se mettre sur ses pattes. Regard Lunaire la regardait faire les larmes roulant toujours dans son pelage mouillé. Il avait failli la perdre. Il avait failli perdre celle qu’il aimait tant. La femelle toussa longuement. Regard Lunaire ne pouvait détourner ces yeux d’elle. Il avait peur que s’il clignait seulement des yeux, celle-ci disparaitrait.

Le regard de la novice croisa le sien. Ces yeux ambrés avaient soudainement repris leurs couleurs, ils brillaient d’une vitalité spectaculaire. Elle commençait à recouvrer ses capacités respiratoires et se rapprochait de lui. Lentement, elle colla son pelage à celui du matou. Le contact le fit frissonner. Sa peau était glacée. Il lui lécha le front, essayant de la réchauffer avec sa peau toute aussi froide. Il sentait ce sentiment maintenant. L’amour. Il le sentait. Il ne le laissera plus jamais quitter son cœur, car il avait décidé. Il avait décidé de vivre le restant de ces jours auprès de Nuage des Lucioles.

« Regard Lunaire ... »

Il la regarda, les larmes abondantes dans ses yeux. Sa voix lui avait manqué pendant ces longues minutes où elle était restée inconsciente. Pleurant, il enfoui son museau dans son pelage, humant son odeur. Jamais plus il ne la quitterait. Il était fait pour vivre avec elle. Elle représentait tellement pour lui.

« Je suis désolée ... je n'aurais pas dû te dire ça ... remettre ton courage en cause ... »

La voix rauque de son amie le fit souffrir. Il n’aimait pas la voir dans cet état. Il continua à lécher son pelage vigoureusement, il essayait de la réchauffer comme il le pouvait.

« Ce n’est pas ta faute. C’est moi. J’aurais dû t’écouter avant de m’emporter… J’aurais dû te demander des explications et ne pas te juger. Mais j’étais jaloux. J’ai peur de te perdre Nuage des Lucioles…. »

Il l’aida à se mettre totalement sur ses pattes. Il fallait qu’ils rentrent sans tarder. Leurs pelages trempés ne les protégeaient plus du froid. Ils allaient tomber malade.

« Je t’aime Nuage des Lucioles. Je t’aime tellement. Il faut que nous rentrions, tu vas attraper le mal vert sinon. Vite. »

Il s’appuya contre la jeune femelle pour l’aider à avancer tout en gardant en contact la chaleur de sa peau avec la sienne.

Regard Lunaire semblait se vider de ses forces à chacun de ses pas, mais il ne laissait rien paraitre. Il devait ramener Nuage des Lucioles saine et sauve au camp. Et sans lui, elle n’y arriverait jamais toute seule. Il sentait tout le poids de cette responsabilité sur ses épaules. Titubants légèrement, les deux chats avançaient tant bien que mal vers l’entrée du camp. Le guerrier sentait son amie frissonner contre lui. Il sentait sa peau gelé, ses poils trempés.

« Je ... Regard Lunaire je t'aime ... je ne pourrais pas vivre sans toi ... »

Le matou tigré sentit en lui une sorte de force nouvelle. Une force qui lui permettait d’avancer plus facilement, de libérer un peu ses épaules de ce poids trop lourd. Il avait l’impression que des ailes lui poussaient dans le dos et qu’il s’envolerait avec Nuage des Lucioles. Le camp était tout proche. A peine passé l’entrée, des regards intrigués s’étaient dirigés vers eux. Mais Regard Lunaire s’en fichait pas mal. Il devait emmener l’apprentie dans la tanière de la guérisseuse au plus vite. Elle commençait déjà à éternuer. « Le mal vert ne la prendra pas, non… »

Il entra dans la tanière de la guérisseuse, mettant à profit son ultime dernière force. Il la déposa sur le sol, cherchant du regard Menthe Poivrée. Elle saura quoi faire d’eux. Il eut juste le temps de miauler le nom de la guérisseuse avant de tomber au sol, à bout de force et de souffle.

Un début de journée ma foi pas très fascinant. Menthe Poivrée s’était éveillée aux aurores, comme d’habitude, avait grignoter un petit quelque chose pour ne pas mourir de faim, et s’était mise au travail. Un peu plus tard, elle était venue réveiller son apprentie, afin qu’elle l’aide.
Les deux femelles étaient restées un long moment dans le silence, travaillant chacune de leur côté. De temps en temps, la guérisseuse jetait un coup d’œil à Nuage des Tropiques pour voir comment elle s’en sortait. Bien. Elle souriait à chaque fois qu’elle faisait ce constat. Elle était intelligente, gentille, et apprenait vite. Elle ferait une excellente soigneuse plus tard, Menthe Poivrée en était persuadée.

Soudain, deux félins vinrent interrompre ce silence si parfait. Elle sentit l’odeur de l’eau, et avant qu’elle n’ait pu voir quoi que ce soit, elle entendit une voix l'appeler. Elle se dévia de son travail et vit une masse de poils mouillés vautrée par terre, le souffle court. Alerte, Menthe Poivrée vint renifler le félin, qui se révéla être Regard Lunaire. Elle s’exclama :
-Par le clan des Etoiles ! Comment ça se fait que tu soies trempé jusqu’aux os ?! En plein hiver ! *pause* Et toi !

Nuage des Lucioles venait d’apparaître dans l’entrée de la tanière. Elle aussi était trempée. Même si elle aurait pu avoir l’air en colère, elle ne l’était pas vraiment. Elle était simplement choquée de voir un guerrier et une apprentie trempés jusqu’aux os venir alors qu’il faisait si froid. Personne n’était à l’abri du mal vert, spécialement ceux qui se promenaient trempés ! Elle en savait quelque chose pour avoir récupéré Pelage Fauve il y a quelques temps dans un sale état. Elle était repartie chez elle depuis quelques jours, malgré les recommandations de la guérisseuse. Même si les rivalités des clans étaient bien présentes, Menthe Poivrée ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter pour elle et ses chatons.
-Bon, venez par là tous les deux ! Vous m’expliquerez ce qu’il s’est passé plus tard !

La femelle tigrée guida les deux tas de poils mouillés vers un endroit sec de la tanière, à l’abri du vent et rempli de mousse sèche. Elle les fit se mettre au milieu de tout ça et ordonna :
-Réchauffez-vous ! Quand vous serez plus en train de grelotter et que vous vous serez séchés, on verra si vous allez mieux !

Cela pouvait paraître un peu étrange comme manière de faire, mais la guérisseuse n’avait pas le choix. Pour le moment, ils grelottaient, frissonnaient et reniflaient tous les deux : elle pourrait leur donner immédiatement les remèdes contre le mal vert, et ce serait fixé. Mais le problème c’est qu’elle n’en avait pas une quantité illimitée, et avec le froid, en retrouver serait une sacrée histoire. S’ils étaient réellement mal en point, Menthe Poivrée les traiterait convenablement, mais pour le moment, elle ne pouvait se permettre de prendre le risque de gâcher de précieuses plantes.